Praha
Praha - 36 ans plus tard …
Venceslas Nametsi.
Sur le trottoir, deux filles,deux silhouettes filiformes.Elles frappent avec force et obstination une cannette vide qui décrie des pirouettes dans l’air et qui déclenche des cascades de fou rire .
Plus stridents que naturels.
Les deux silhouettes regardent quand à droite quand à gauche pour voir si elles arrivent à accaparer, au moins pour un seul instant, l’attention des passants.
Elles y arrivent ; sont colorées, fraies, vives, provocatrices sans le vouloir, s’introduisant dans un monde qu’elles ne connaissent pas, qu’elles ne soupçonnent pas …une réalité qu’elles ne désirent pas …
Désert des pensées, peuplé par des grands hommes bleus, avec le regard aussi âpre que leur destin et l’âme aussi blanche que leurs turbans et leurs chalvars …
Puszta des rêveries, du jamais reconnu, du jamais partagé, ni avec elles-mêmes ni avec…
Taïga des douleurs refoulées… tigre trop blessé pour crier, larme trop sèche pour continuer son chemin dans un coin de visage, cri prisonnier dans une phrase véhémente,aussi tôt poussée,aussi tôt oubliée,car trop clair et trop fort pour être sincère…
… et la canette, obéissante, continue son évolution sur des trajectoires impondérables, orbites incalculables, symbole d’insouciance, rappel de liberté, prière a l’avenir !chaque passe, chaque interception réussie est une victoire et de victoire en victoire les deux ombres traversent leurs existences à quelques mètres de l’endroit ou Jan Palach a décidé d’en finir avec la sienne…
1970…
… il y a 36 ans…
