autobiografie minimalistà

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Pour la Première Fois,
j’ai Voulu … Mourir
avant Elle …


“Celui qui vit, il vit.
Quand quelqu’un meurt, c’est seulement parce qu’il a assez vécu …
Il faut vivre vite, car ça coute cher … »

(---Catalin Dorian Florescu--- « le masseur aveugle» page 115 Ed. Liana Levi)


Si on vit vite ça veut dire qu’on vit bien. Moi, simple pion bidimensionnel sans ombre ni velléité d’avoir une, je me sens placé au milieu, juste au milieu, entre deux voies ferrées sur lesquelles, en sens opposés, deux trains se croisent à grande vitesse. Moi, debout, je tire des conclusions. Courtes, Précises, Justes, forcement justes, car se sont les miennes. Je ne fais plaisir qu’à moi-même. Par égoïsme ? Par une sorte de timidité ? Ou par l’impossibilité de toucher l’impossible ? Qui sait ?
En paraphrasant le même C.D.Florescu, je ne veux pas grandir plus haut que ma taille et mon surréalisme ne sera pas adapté à la jalousie de mes voisins …

Mai 2009 Cernay la V.

Ma Skorboura n’a jamais été si pleine, si ouverte, si accueillante … une fois le seuil franchi je me sens enfin chez moi ; les tiroirs sont pleins avec des souvenirs ; sur les murs, aussi, bien encadrés, s’entassent des images qui m’ont accompagné tout au long de ma vie ; évidemment, certaines se raccordent aux murs avec des translucides toiles d’araignées, témoin de l’immobilisme des immuables opinions (…) ! Pour d’autres, le flou gaussien montre le contraire, l’éternel mouvement sans espoir qu’un jour ça s’arrête …
Je vis intensément le plaisir d’être un élément d’un grand tableau surréaliste, un élément parmi tant d’autres. Je suis fier de cette richesse, car j’en suis le créateur. Un piéton qui ne presse pas ses pas (…) sur le chemin du temps. En marchant, je regarde autour de moi et je remercie ceux qui ont décidé le début de ce chemin ; seul regret : ce n’est pas moi qui vais décider quand, où et, surtout comment, ce chemin finira …
En attendant, voici l’histoire achronologique d’Une vie (autobiographie minimaliste boiteuse) (o càlcàturà tare, o càlcàturà moale…)

Janvier 1970 Bucuresti

Une plage bleutée et floue, caressée par des vents unidirectionnels, s’étale sous la lumière du soleil dardant .Les vagues rythmées par une respiration bruyante et lointaine, à chaque passage, balayent la plage .Les algues gluantes et les carcasses des poissons, lances pestilentielles jetées dans nos narines, offrandes odorantes apportées aux forces destructrices de la mer, s’y retournent …
Je rêve d’être un peintre qui, debout, devant mon chevalet, je contemple cette faune, fruit de mon imagination, autre fois si vivante… aujourd’hui si morte, en mouvement seulement grâce à des forces extrinsèques. Avec mes pinceaux virtuels, je perce le mystère de ce monde qui s’étale à mes pieds. Je lis dans ces cadavres et dans les traces qu’elles laissent sur le sable comme dans le marc de café. Lambeaux de chaire et de peau s’accrochent désespérément des os de sèche, des coquilles cassées, des branches mortes qui trainent un peu par tout, ou seulement des gros cailloux multicolores … tout ça réveille des êtres bizarres ; des mi-poissons mi-homme, mi-vautour mi-cheval, croisent des énormes gallinacées à bec recroquevillé et des serpents incolores amputés d’une de leurs quatre pattes ; toutes ces formes se croisent et s’entretuent ; les batailles sont brèves, le sang qui coule n’est jamais rouge. Les cris de douleur sont étouffés par la terre qui pénètre dans les gueules ouvertes.
Les yeux injectés regardent sans voir les derniers spasmes du combattant voisin. Une ombre, mi-femme – mi tortue, essayait de défendre avec une énergie faiblarde ses trois derniers œufs cachés sous un rocher… trop tard. La vague, la dernière avant la tombée de la nuit, récupère tout ce qui trouve sur la plage ; la noyade semble être un soulagement pour les moribonds… la mort est si belle à côté de telles tortures multicolores et inventives
Et finalement, les bruits s’estompent, le sable est lavé, les nuages s’égarent derrière le soleil qui redevient maître ! Moi, le peintre, toujours debout devant Mon chevalet, prêt à comprendre son nouveau décor… Une chaise blanche avec la peinture écaillée, en cachant sans difficulté les dorures tarabiscotées autre foi évidentes, implante vigoureusement ses quatre pattes dans le sable fraichement tamisé. Assise dessus, une petite fille, habillée avec une longue robe blanche. Une vingtaine de roses y sont cousus ; une vingtaine de lucioles rosacées étincelantes… les pieds ballants (balanga-balanga) tracent des sillons dans l’eau qu’ils effleurent à peine.
Le dos vers la terre, les mains sagement sur les genoux, elle scrute l’interminable et lointaine ligne du large océan. Soudain la lumière baisse, le noir s’installe et la petite fille devient inquiète ; elle a peur ; elle tourne la tête et avec les yeux demande à l’aide…
À l’aide !


Aout 1961 Bucuresti

… à l’aide !
Je lui tends une grande assiette avec quelques cerises mûres. Gravées sur les bords de cette assiette il y a trois lettres et un chiffre :
« C.F.R.2 » murmure la petite fille.
Une infirmière, entre deux âges, fausse blonde et moche s’approche sans bruit par derrière. La transparence de sa blouse tachée par le mercurochrome, n’arrive pas à cacher les formes de son corps qui a cessé depuis long temps de réveiller l’imagination des médecins à la recherche du grand oubli. Dans sa poche droite, un stéthoscope sale déborde ; inutile de le laver, car elle ne sait pas s’en servir. L’odeur de désinfectant qu’elle dégage annonce son approche, mais trop tard ! Elle se jette
vers l’assiette et ses doigts noueux, déformés avant l’âge, accrochent les cerises et les entassent dans la bouche édentée, béante en attente de la proie. Les fruits se mélangent vite avec l’haleine qui les accueille. Le bruit du mâchonnement, l’odorat, accompagnent le jus rougeâtre mousseux qui surgit entre les quelques dents restantes, à peine implantées dans les gencives purulentes. Les soupirs de plaisir du grand prédateur se mélangent avec les larmes de grande souffrance de la petite fille
Pendant ce temps, la nuit tombe comme un voile léger sur la plage. Suivi par le regard protecteur de la lune, un pélican égaré cherche la route de retour vers Bràila.

Avril 1972 Bràila

La bas, dans une « cage à poules » d’un cartier populaire, au premier étage, une femme grosse, à peine vêtue par sa chemise de nuit jaunâtre avec des petites fleures vertes, git par terre dans le couloir qui mène de la cuisine vers la salle à manger. Sa respiration, saccadée, est rythmée par des soupirs de douleur. Will Ma, impuissante, regarde et prie. Avec des pas de danseuse chinoise à l’Opéra de Beijing, s’éclipse lorsqu’une petite silhouette d’homme surgis dans le noir « t’as vu ce que t’as fait ? » dit il à la jeune fille qui retient avec grande difficulté des lourds sanglots
(La petite fille a beaucoup grandi…). Des larmes chaudes trouvent le chemin sur son visage, puis elles coulent et tombent avec un bruit sec sur les seins opulents de la femme toujours allongée. Après quelques larmes, sa respiration reprend le rythme normal et les soupirs s’espacent.
« T’as vu ce que t’as fait ? » répète l’homme de plus en plus menaçant, moustache hérissée et les yeux de plus en plus petits.
La jeune fille, présence laiteuse et presque transparente, tremble le bras tendu, impuissant, au long d’une verticale imaginaire et instable. Son corps est là, prés de sa mère allongée dans le couloir, héroïne d’une pièce de théâtre qui se joue à ses pieds. Son âme est déjà loin. Elle fait des plans d’avenir; de cet avenir apparemment incertain, tous ceux présents ne font pas partie. À genoux devant moi, ses yeux dans mes yeux, la bouche entre ouverte et pleine des mots qui ne peuvent pas surgir, elle condamne le mariage morganatique du frère prodige et la fuite dans le désert du juif menteur. Elle oubli d’aider à se lever la femme restée allongée par terre et qui est de plus en plus lourde. La femme regarde autour d’elle et oublie de demander à l’aide. Oublis ou refus ? … elle Ne veut plus se lever… elle ne se lève plus ! Conscient de l’impossible, l’homme à moustache hérissée, s’allonge près d’elle et soupire ; il ferme les yeux… il fouille dans sa poche pour un mouchoir en tissus et dans sa mémoire pour admirer une dernière fois le Danube qui monte vers Donau Eschingen.
Ensemble, les deux, définitivement morts, regardent le plafond fraichement peint en attendant… le tremblement de terre suivant. Leur dernière pensée vers un Puf (fulet) blond et vers tout le mal de quoi ils la croient responsable. Cette dernière pensée est aussi vers un triangle à quatre côtés. Leur fille le serre fort et avec des gestes infantiles essaye de le cacher sous son baby-doll rouge à petits poids blancs.
De la hauteur de la tour de Chindia, je la regarde et mon souffle s’arrête ; je frappe l’air à la paume largement ouverte ; j’invoque la vérité et je chasse le mensonge.
Je descends dans la Place de la République et je me dirige vers le port ; avec un billet de 50 lei, j’achète deux billets pour Sulina.

Août 1973. Sulina

Sulina. Enfin, nous voilà à la fin de notre voyage ; à bord du bateau, j’ai mangé des cacahuètes yougoslaves, j’ai bu de la bière moldave et j’ai fumé des cigarettes américaines que j’ai achetées chez les Tziganes du port de Braila à un prix exorbitant…
Pendant les quelques heures de bateau qui séparent les deux villes, j’ai eu le temps de faire des projets et plusieurs simulations de la vie future.
Une fois les amarres fixées sur le quai, à bord du bateau « Sàgeata » on pouvait entendre seulement les mouches qui étaient en train d’agoniser, collées à jamais sur les bandes adhésives et jaunâtres accrochées aux plafonds ; les moteurs arrêtés, les passagers descendus, l’équipage resté assis autour d’une table basse et boiteuse dans le premier bodega du coin. « Sàgeata » avait son nez dans l’écume épaisse, verdâtre et sale qui l’a accompagné de Bràila jusqu’au Porto Franco de Sulina.
Les cormorans et quelques pélicans saluèrent son arrivée avec des sons gutturaux qui perçaient facilement la brume qui venait de s’alourdir au dessus des vagues. Les couleurs pastelles d’une aquarelle trop aqueuse se mélangeaient en réalisant des tons et semi-tons osés ; les effets inattendus surprenaient, laissant bouche bée le plus part des peintres de dimanche qui se bousculaient parmi les bateaux pourris qui étaient en train de vivre leurs dernières heures dans la rade. Quelques lipoveni ivres et entristés par leur ivresse, racontaient leur longue journée en mer ; avec une cigarette « Carpati » à la main et une bouteille de vodka « Wiborovka », par terre, entre eux… Elle passe de main en main signe de « cohésion de pensée », de « vie commune », « d’unité d’action »
(Unde’i unu’ nu’i putere; unde’s doi, puterea creste…). Leur visage taillé par les vents âpres de la mer, le tabac bon marché et l’alcool trois fois distillé, exprimait un vide profond ; leur illettrisme se reflète pleinement dans leurs yeux bleu clair assombris par des sourcils blonds, rebelles et touffus. Ils arrivent à partager quelques histoires sordides qu’ils ne cessent de se raconter encore et encore, chaque fois les mêmes et chaque fois le groupe fait les mêmes commentaires, à un soupire ou une injurie près… pas loin, un grec fait tourner ses màtànii (chapelets) en bois probablement rouges il y a quelques dizaines d’années ; la monotonie de ses longues prières orthodoxes rivalise seulement avec l’absence totale d’imagination du tzigane qui fait jouer son ours qui tourne, tourne, avec un seul désir évident d’en finir une fois pour toujours, de finir ses jours, de noyer son destin triste dans les vagues du vieux Danube…
« Joacà, Joacà Mos Martine, cà’ti dau pîine cu màsline »
J’aurais voulu figer ce tableau, pour toujours ; seul le fleuve en mouvement, symbole de la force, pourrait garder son écoulement insonore et triste.
Les bateaux, les nuages, les silhouettes des hommes et des femmes sur la digue, le chien qui
court en aboyant tristement et inutilement derrière la charrette des tatars, et bien, tout ça, je les percevais comme des leurres en carton patte, un peu kitsch dans la lumière du soleil couchant… comme si ça ne suffisait pas, à un moment donné le spectacle gagnait en tension ; les sons que j’apercevais auparavant fermes et distincts, devenaient peu à peu lourds et lointains ; leur sourdine traversait des longs kilomètres de terre et de feu, état de la matière pas inconnue jusque-là… les couleurs se distorsionnaient , mon horizon se rétrécit brutalement par une ombre géante, longue et infiniment noire qui se jetait sur moi. Une douleur pulsatile perce la boîte crânienne. Son plongeon précis, direct et brutal fut si rapide que mon esquive s’avérait totalement inefficace… Son apparition se faisait accompagner par des sons des cornes anglaises, vifs, presque gais, annonçant l’entrée en scène de quelque chose ou de quelqu'un… Le soleil changeait de couleur et d’intensité dans le rythme des milliers d’instruments cachés sur les berges du fleuve.
Des heures et des années passèrent et mon esprit se trouvait toujours couvert par cette masse noire, fière et bourdonnante ; des centaines et des milliers de manières de négociations me traversaient l’imagination qui travaillait, travaillait sans cesse.
Je les repoussais une par une et à la fin j’ai trouvé l’abandon comme unique solution ; mon agresseur sentit la détente de toute ma masse musculaire ; sa victoire était évidente et il réagit en conséquence. Petit à petit, ses contours devenaient flous, puis irréguliers ; son hétérogénéité s’accentuait ; elle s’éloignait en restant proche, elle disparaissait sans me quitter… j’ai eu besoin de quelques longues années pour me rendre compte que toutes ces contradictions avaient une unique et évidente explication : l’ombre quittait mon univers extérieur pour regagner mon cosmos intérieur… elle était dans moi, ou mieux, elle était moi !
Lorsque cette migration subtile prit fin, (je me rappelle comme si c’était hier…) un lourd rideau se levait ; le jour devenait jour, la nuit était d’un vrai noir, profond et propre ; comme le jour et la nuit, comme le bien et le mal, comme le haut et le bas, beaucoup d’autres opposées prenaient leur vraie place une en face de l’autre, avec des vrais rapports liés à des repères qui m’appartenaient à moi et seulement à moi ! Je me découvrais avec joie et intérêt ; pas habituel de se faire découvrir par soi-même ; je prenais le temps de savourer ces délicieux instants ; mordre à pleines dents ce gâteau qui semblait sans fin ; me baigner dans cette lumière crue avec des couleurs fondamentales…
Le surréalisme de la situation ne devait plus être démontré. Le soleil, le ciel, le fleuve immobile, et moi ; assis sur une chaise blanche avec la peinture écaillée, plantée en plein milieu du fleuve. Ma poitrine ouverte, profonde penderie où quelques costumes d’époque sont rangés, signale d’alarme témoignant du passage inéluctable du temps ; chaque costume, chaque couleur, un moment important de ma vie ; dans mes bras un animal imaginaire ; à mon cou une clé ; elle ouvre une porte sur laquelle est marqué … « cine’i ? Unde’i ? Si ce vrea ?... »

… « Cine’i, unde’i si ce vrea ? » (ghicitoare-devinette)
Luna’i plinà, noaptea’i neagrà
Prin coclauri ea aleargà
La zàbrele ochiu’i plînge
Pe baltag inima’si frînge …
Cade, se ridicà , cade …
Fatza’i în tàrînà toatà
Gîndul e în zbor departe
Graiul e si numai e
Plin de viatà si de … moarte
Are’atîtea de’ndrugat
Màrturii cu mii si sute
La mai toti ea s’a rugat
In genunchi, Doar s’o asculte …
Un opait îi lumina Soarelui mîngîitor
Vîntu’i mîna ce dezmiardà
Apa’n palmà, viu izvor …
Priponità cu privirea
Se opreste, Mà priveste
Se înclinà si sopteste … Nu aud …
Ce bine’ar face sà se prindà si cu mine
Hora snoavelor uitate
Din cei timpi cu cea dreptate,
Din cel veac frumos cîntate …
Si se’nclinà. Iar sopteste ;
Nu aud …Se stràduieste ;
Tot n’aud …
… mà pàràseste, fàrà grai
Si nici privire
Fàrà grai, fàrà suspin
Poate doar o amintire
Pe ràboj
un semn d’iubire
un semn de chin !

 

Avril 2009 Cernay la V.

Ma vie, une suite sans fin de chambres et antichambres, accolées ou superposées, arrondies, parallélépipédiques ou sphériques, bien éclairées ou en pénombre totale, aérées, parfumées, et chauffées, ou au contraire, caricatures des appartements « wagon » construits avec grand succès au début du siècle…
… quoi ? C’est interdit ? Je veux raconter, tout raconter ! Restons sincères et dans le cadre de l’acceptable, cette course vers une sorte de vérité je la veux comme une image de marque à tout jamais.
Moi je suis un pion, un simple pion sur la grande table d’échec ! Si je me fais mastiquer par la reine ou par le fou, pour moi, la mort est la même … je vis lorsqu’on me dit de vivre, je respire seulement avec une haute autorisation, je meurs à la commande !
Parfois je fais semblent de me révolter pour montrer aux autres que j’existe, (ou pour me montrer à moi-même ?) ou pour marquer l’appartenance à un groupe ou à un mouvement de pensées que j’espère assez important pour le soutenir … il y a deux semaines j’ai découvert qu’appartenir au groupe formé par ceux qui ne mourront pas DEMAIN, est une très bonne nouvelle !
Mais… …
Où est la fenêtre ouverte vers la nuit profonde ? Elle laisse pénétrer dans la chambre d’hôpital seulement le sifflet triste et pleurnichard d’un marfar (train de marchandises) lointain ; la chambre est trop petite pour que je puisse développer mes douleurs et surtout me craintes … heureusement La Main est à côté ; elle chante « vécérnîi zvon » … où est la fenêtre qui donne sur le port de Constanta ? Le grand bateau rouge ? Et madame Katz qui arrondi ses fins de mois avec un faiblard loyer négocié avec les riches qui ne sont pas riches…


Août 1988 A1

Destination Bughea de Sus (de Jos ? je ne me rappel plus…).
Ma Dacia 1410 Coupé blanche, longe l’autoroute 1, (1, car elle est unique) puis elle attaque sans crainte les serpentines serrées qui se faufilent entre villages valaques, appauvris, mais propres, parsemés entre les champs de sonde pétrolière. Le vent caresse les squelettes noirs salis par des couches successives de goudron épais qui bourgeonne autours des engrenages en mouvement continu et monotone.
Scîîîîrtzzzz, scîîîîîîîrtz !
La route est parfois surplombée par des cadres ou semi cercles en bois sculpté ou en fer forgé, mini arcs de triomphe dédiés à la victoire du socialisme (enfin !) dans tous les domaines
d’activités ; ils sont ornés par des énormes marteaux et faucilles, le plus souvent peints en rouge sanguin ; ce n’est pas, de toute évidence, pour se souvenir des millions des victimes tuées, torturées dans les geôles communistes. Hésitation devant chaque carrefour mal signalé ; puis « votre destination est proche », puis « vous êtes arrivés » ; « tout le monde descend ! »
Chaque calque a son personnage, son histoire, mais toujours le même décor. En superposant la multitude des calques qui se pressent de rebondir dans ma mémoire, je détruis l’élément « temps », en sauvegardant seulement la dimension « lieu» que je développe, que j’embellie.
Les silhouettes se succèdent, elles montent main dans la main et yeux dans les yeux, Golgotha sans pouvoir ni vouloir prévoir la descente ! Elles empruntent le sentier qui traverse le jardin en friche, montent les quelques marches du pridvor et s’arrêtent quelques instants devant la porte. Les bras au long du corps. La tête baissée. Comme pour se requérir. Les bruits de l’herbe qui pousse, des fleurs qui s’ouvrent et des insectes qui les survolent réchauffent l’air qui monte aux cieux dans un trémolo qui déforme les contours et qui estompent les couleurs. Quelque part, pas loin, un essaim prend forme et se déplace en formation d’attaque vers une destination aussi vague que sécrète.
Quel dommage ! La mémoire sonore des lieux n’existe pas… devant cette porte on aurait pu entendre tant des bruits, de chuchotements, de phrases sans fin, ou jamais finies (ce n’est pas la même chose…), des prières multe fois répétées (gata, gata, gata !), des promesses jamais tenues, ou « simplement » des très difficiles questions posées par des yeux en larmes…
… « Pourquoi ? Seulement par curiosité ? »
… sans pouvoir donner la réponse ! Les mêmes yeux préfèrent-ils, peut-être, ne jamais entendre la réponse ! La distorsion du corps dans un plaisir trop mal simulé rime très peu avec la sincérité des larmes qui coulent entre les seins fatigués de solitude ; une par une, elles se font englouties par le drap froissé en longue attente pour la blancheur oubliée ! Les talons se débâtent comme pour trouver une marche pour pouvoir remonter le temps. Pour tout recommencer ? Pour ne rien changer ou au contraire ?
Tout !
D’un seul coup, la silhouette arrête de bouger ; elle a tout compris .Un rayon timide de lumière pénètre entre les barreaux rouillés et lui montre l’endroit précis ou elle doit s’agenouiller. Les bras et la tète très en arrière, la bouche entrouverte bois mes mensonges …
Trop de mensonges d’un seul coup ; en haletant, seulement les yeux roulent dans des orbites rougeâtres ; elle manque d’oxygène… les pupilles énormes, ses yeux implore ! Trop de soumission m’empêche de lui accorder la pitié ; non, elle n’aura pas la vérité qu’elle cherche ! Plusieurs vagues de frisson lui traversent l’esprit et les os longs, et avec les dernières forces elle se donne la mort …moi, debout je regarde sa disparition et je savoure sans plaisir, la victoire !


Juin 2009 Cernay la V.

Vivre responsable.
Aimer responsable.
Mentir responsable.
Haïr responsable.
S’absenter responsable.
Courir responsable.
Flatter responsable.
Emigrer responsable.
Mourir responsable.
… responsable…

… en murmurant ces sentences avec valeur d’axiome, une vieille dame longeait l’ulitza (petite ruelle de campagne) poussiéreuse ; ses regards fugitifs montraient l’angoisse qui l’accompagnait en même temps que les aboiements sans haine des chiens heureusement bien enchaînés ; les lambeaux de tissus gris, sales, décolorés par le temps et le soleil, avaient du mal à couvrir son corps tuméfié des coups du sort ; chaque bosse, chaque saignement, chaque douleur racontaient une mauvaise rencontre, ou une bagarre, ou un regret tardif, ou une erreur judiciaire … chaque point douloureux de son corps était un témoin de la méchanceté des gens et de l’injustice infligée ; ses pas hésitants se faufilaient au long des encloîtres délabrés, accompagnés par les pierres et les morceaux des bois jetés plus ou moins maladroits par la shleahta (groupe bien organisé, structuré) des pouradeï (enfants tziganes) qui lui courais après ; les enfants, avec leur jugement simple et primitif, le résultat plus tôt d’une intuition que d’une réflexion, ont compris sa faiblesse, sa vulnérabilité et donc ont décidé sa mise à mort ! Les projectiles touchaient de mieux en mieux leur cible et chaque fois la victoire était soulignée par des cris de joie; chaque fois que la douleur réussissait lui arracher une grimasse, les cris étaient encore plus forts et ils trouvaient le paroxysme en voyant le sang faisant surface à travers la crasse et les larmes. La vieille dame avec les pas de plus en plus rares et petits, poussait lentement un landau tout neuf, tout beau, en contraste avec tout ce qui l’entourait ; son rouge vif était orné avec des dorures baroques et grosses roses blanches en relief ; à l’intérieur du landau, un sur l’autre, quelques souvenirs, lourds, difformes, intemporels, inodores, couverts par un tischleiffer brodé comme une prière amené à sauver une âme !

Aout 1988 (suite) Bughea

Dehors, en contraste avec l’obscurité intérieure, les flèches incandescentes du soleil transpercent la peau qui suinte un liquide salé - sucré idéal pour attraper les regards des abeilles.
L’ouverture de cette porte écaillée, autre fois d’une « verte asperge », se fait lentement avec des grincements dignes d’un événement beaucoup plus sordide que celui-là. L’odeur de « renfermé » profite de la porte enfin ouverte pour s’échapper et se diluer dans l’air frais et propre de campagne sous Carpates. La lumière tamisée par le feuillage dense du châtaignier caresse les corps qui s’allongent soumis sur la tcherga de laine vierge ; ses fils durs pénètrent dans tous les plis de la peau et la douleur commence faire partie du jeu, encore un petit élément inattendu dans ce havre présumé sans surprise sensitive.

JUIN 2009 Cernay la V.

Pour la première fois, j’ai voulu mourir avant Elle …
Pour la première fois, je ne pensais pas à moi, je me plaçais dans un monde ou mon rôle n’existait pas ; n’existait plus ; scénario difficile à imaginer…

Septembre 1981 Bucuresti

En traversant La Place de l’Université, le kilomètre zéro du pays, un sentiment de voyageur éternel m’envahit ; je le fais chaque matin, et chaque fois la même ENVIE d’évasion me domine ; je ne peux et je ne veux pas lutter contre… …
Attente devant le feu tricolore ; attente que les participants au trafic, démarrent, « comme les moutons à la bergerie », lorsque l’enclos s’ouvre. Dans la fumée des pots d’échappement, je me rappelle…
…je me rappelle comme multe fois, étant enfant, dans le train qui m’amenait invariablement vers la côte de la Mer Noire, je vivais un étrange désir ; le train traversait des villes, des villages, croisait des routes des campagnes ; en regardant la queue de camions, carrosses et rares automobiles qui attendaient sagement derrière la barrière, le nez collé de la grande vitre du compartiment (e pericoloso sporgersi), j’avais un seul et même rêve : trouver la force occulte nécessaire de tout geler; vivre dans un monde figé, sans vie, mais si vivant, car il y avait une vie derrière et une autre vie ,longue ,très longue devant, la plus intéressante, car inconnue, palpitante même dangereuse ; avec un geste magique, le train s’arrête, je descends et je pénètre dans ce monde situé de l’autre côté ;
une fois descendu de train, la vie reprend, le tumulte et réel ; la vie continue ; je vis avec ceux qui attendent que la barrière se lève, je me promène dans les ulitzas poussiéreuses et dans les jardins verdoyants et bien rangés ou la femme paysanne ramasse les tomates ;devant la maison, un vieux, la paume corniche (streasinà) devant les yeux, se protège contre le soleil battant ; comme ça il peut scruter tranquillement les rares passants ; échange court de formules classiques de salut, agrémentées pour les copains par quelques mots plus ou moins coquins ; le dispensaire n’est pas loin ; une par une passe la dentiste, la pharmacienne, la pédiatre, les quatorze sages femmes ou infirmières, la femme de ménage ,et nea Nae , le cocher, dernièrement monté en grade de garde de corps.
Après une certaine hésitation, je m’arrête devant ce brave gaillard ; il me sert la main et il me fait signe d’entrer…
(La peau de sa main droite me rappelle les histoires de ma mère qui, dans les années quarante-cinq, coupait des bois à la hache pour avoir des ampoules aux doigts ; pour donner l’impression des mains d’« ouvrière » ; la peau fine et blanche était mal vue, signe d’« ennemie du peuple » donc passeport difficile à éviter pour un viol collectif ou une balle dans la tête… c’était les temps de « davaï ceas »)
…J’ouvre la porte de son « bordeï » :
« Sàrut mîna ! »
Une vieille femme coupe la roue de màmàligà avec une ficelle ; je prends ma part et je la jette dans le lait frais, très frais ; le sfîrîit, brutal réveil, me replace dans le wagon C.F.R., bercé par les tika-tak, tika-tak des roues
L’incursion dans le temps est finie !
…… une fois le kilomètre zéro derrière moi, mes pas me conduisent devant la grande porte multiséculaire de l’hôpital Coltea ; je la pousse, je traverse le hall blanc (forcement blanc, tout est blanc ici) et froid. Le soleil qui se lève au dessus du palais Sutu, projette sur les dalles du couloir l’ombre de la croix dressée sur le toit de la chapelle des Brîncoveni, située juste devant l’entrée (chapelle par miracle échappée à l’épuration communiste). Je fais un détour, je ne peux pas marcher sur la croix, même si c’est seulement une ombre, je me signe avec la langue sur le palais et j’accélère les pas (c’est mal vu de te signer sur ton lieu de travail). Mais mon élan est vite freiné par une silhouette qui surgit de nulle part ; c’est elle, je l’attendais ; sa présence m’était nécessaire comme prétexte pour changer de cap. Elle se plante devant moi, me regarde ; les mêmes yeux qui, il y a huit ans, regardaient sa mère allongée inerte dans le couloir ; la main droite qui caresse le coude gauche avec la même fidélité fébrile… cette fausse fragilité qui t’appelait, t’obligeait presque de courir vers elle, de secourir cette peau trop blanche, ces yeux trop beaux cette respiration haletante ; c’était les chants destructeurs des sirènes danubiennes…
« J’ai oublié te dire… » Commença-t-elle, mais très vite elle oubliait c’est qu’elle… a oublié de me dire. Les yeux parlaient ; le frisson de tissus accrochés sur les collines de son corps est rythmé par les battements de mon cœur. Elle me prend la main, s’allonge sur les dalles froides, puis elle écarte les bras et se superpose sur le signe de la croix toujours présent. Elle veut fermer les yeux, mais non ! Je l’oblige de les ouvrir, de voir, d’entendre. Je fais défiler devant sa mémoire les bonheurs et les malheurs de ces dernières années. Je lui offre une belle coupe de cristal pleine de regrets et d’espoirs ; je ne lui dis pas la vérité ; je ne lui dis pas que tout est un prétexte ; tout est une manière de vaincre la faiblesse, de me donner du courage pour changer de cap…


1 janvier 1984 Piazza Obor

« Ma Ma, nu pleca … »
Mes pas se traînaient dans la motchirlà (la gadoue) ; la tête haute, les épaules en arrière, sa silhouette sculpturale dans le cadre de la fenêtre du premier étage, ne bouge pas ; sa main gauche soutient le sein à moitié dévêtu, comme pour soulager une douleur ; sa main droite caresse machinalement, absente, la petite tête blonde qui a oublié pour un instant de penser à son père et à la tablette de Toblerone promise. Ses regards innocents sont figés sur la robe noir et mauve de sa mère ; mouillée par les larmes, elle se colle sur la peau ; entrouverte, elle laisse entrevoir des choses que le petit garçon ne comprend pas ; il comprend seulement qu’il ne fallait pas les voir, quand, avec un geste rapide, désordonné, absent, sa mère remet en place les plis du tissu usé. Il profite que sa mère l’ignore de nouveau et qu’elle regarde encore et encore les traces que mes pas ont laissées dans la motchirlà.
« Ma Ma nu pleca » elle murmure de nouveau, sans faire attention à la main que son fils glisse sous sa robe ; elle pense à mes dernières caresses ; ce qu’elle sent maintenant se ressemble tant … elle s’ouvre aux souvenirs qui se glissent, qui l’envahissent, qui la pénètrent…la
brulure fend son bas ventre vers le haut, jusqu’au menton qu’elle soulève fière ; fière de souffrir, de faire souffrir, de traverser la souffrance qui lui colle à la peau comme une seconde chemise, d’être là, aujourd’hui, demain, pour toujours ; dans dix ans, dans vingt ans, elle pourra raconter à la tête blonde, comme on a tous souffert, comme la mort et l’amour sont entrés le même jour, en même temps, par la même porte. (Ma mère est morte, me dira-t-elle) .Elle pourra raconter comme la première nuit sans moi est tombée sur les tilleuls qui ont tant vu, tant entendu. Comment s’appelait la vielle voisine au deuxième ? Elle pourra lui raconter aussi ; elle aimait tant vider son sac devant elle ; tant des soucis, des incertitudes, des plans, d’angoisses…Le petit garçon a envie de poser des questions ; il a très chaud ; sa mère aussi ; il essuie sa main mouillée sur la couverture du lit à peine refait à la hâte, après mon départ ; ça ne suffit pas, il doit laver ses mains «Lave tes mains » dit sa mère ; sous la douche, leurs regards et leurs bras se cherchent et se retrouvent dans le même album de photos jaunies avant le temps, et milliers des images défilent sous leurs yeux en larmes ; en sortant de la salle de bains Ma Ma couvre son enfant avec un soupir lourd ; à quoi elle pense ? À mon départ, ou à quoi va-t-elle donner ce soir à manger à l’éternel et grand masturbateur ?
Je ne saurais jamais !
Les traces dans la motchirlà prennent le symbole d’un alphabet à nous deux, qu’à nous deux, avec le seul but d’écrire notre histoire, nos impossibles, nos douleurs, nos cris d’espoir ; le bonheur de tant de découvertes… le malheur de tant de surprises… le mal qu’on a fait aux
autres s’est transformé dans leur bonheur ; le bonheur qu’on s’est fait , s’est transformé en malheur, trampoline m’aidant à mieux se lancer vers le bonheur suivant ,plus vif, plus vrai, plus lucratif (…) que tous les autres bonheurs que mon cosmos a pu connaître.
Ma Ma … nu pleca
Si aM plecat !
La belle coupe de cristal… maintenant comprends-tu pourquoi tu l’as eu ? La belle coupe, où peut’ elle gésir maintenant ? Dans la gadoue de quel sentiment inexplicable, dans la motchirla de quel pays lointain que je ne verrai jamais ?

Décembre 1957 Bucuresti

Les chants des vents sur les cordes des arbres, pimentés par les aigües des oiseaux que je connaîtrais jamais leurs noms ; qu’elle est magnifique l’âge lorsqu’on se pose la question si c’est l’arbre qui fait le vent, ou au contraire, c’est le vent qui bouge l’arbre (vîrsta întrebàrilor…nu mà mai joc cu pàpusica seara). L’âge lorsqu’assis sur la luge, la terre est si proche, le ciel est si loin… l’impatience qu’on ne cache pas de grandir, de vouloir s’approcher des nuages. La neige cache facilement le trottoir de vis-à-vis et les distances sont plus longues. Le bonheur d’avoir toujours une main pour m’aider, pour me caresser, pour s’arrêter simplement et se reposer sur ma tête.
À la gare, les trains semblent des monstres ; les grappes humaines restent en équilibre instable accrochées sur les corniches rouillées ; la guerre n’est pas loin ; la pauvreté n’est pas seulement un souvenir ; les pas des troupes d’occupation passent toujours sous mon balcon, associés à l’odeur d’O-di-colon (eau de Köln), que les femmes des officiers Rouges prennent comme prise de guerre pour se faire mouiller de tête aux talons.
Habillé avec un spiel-hosen (barboteuse) bleu aiguayé par un grand nœud papillon rouge fortement amidonné je traverse cette période en essayant de trouver un bon ami pour « faire » les lacets à ma place et pour m’accompagner au petit coin.
Les moments de grande dignité passés chez « Madame » sont loin ; là-bas, habillé en costume, avec une cravate en soie, je prends les premières leçons d’élitisme. Les heures d’éducation musicale, les octaves et les solfèges, ne me manquent pas, mais les portatifs et les clés vont réapparaitre souvent dans mes visions surréalistes symbole de l’appartenance à un monde que j’estime convenable, à ma famille, symbole avec la force d’une racine. Cette image va revenir, elle aussi, souvent, sous une forme ou une autre. La racine, signe de continuité entre le passé, d’où elle trouve la nourriture, et l’avenir, vers lequel le tronc se dirige.

Le départ, le moment lorsqu’on a peur de noir, l’arrivée, le moment lorsqu’on a peur de perdre la prothèse dentaire dans les toilettes…

En amour il y a que le début et la fin qui conte ; la farce est toujours pareille. La vie tout à fait le contraire ; entre le début, tout en douleur et la fin, tout en tristesse, le reste est toujours différent,toujours autrement que prévu ; mélange de surprise, un imprévu pas toujours positif, parfois si négatif que la fin est le soulagement tant attendu…
Chaque jour me dit, je me souhaite plus tôt, que je suis à mi-chemin, qu’il y a tant de choses encore à vivre, à raconter, mais en même temps, il y a des moments lorsque j’ai peur que ce virage serré sera le dernier, que chaque battement de paupières est le cri de la mort. Parfois j’aime croire être bon, positif, responsable, compréhensif, créatif.
Être bon, dans l’absence de la bonté des autres, présumée ou réelle ; possible, mais pas crédible…
Positif ; oui, presque toujours…
Responsable ; oui…
Compréhensif ; non, jamais !jamais envers l’inutile, l’inacceptable, le négatif gratuit et ordinaire…
Créatif ; oui, j’espère…

Pendant les mariages afghans, les mariés sont couverts avec un drap et sous le drap, les amis, la famille, leur donnent un miroir. Pour quelque minutes, à l’abri des regards, les deux mariés se reflètent dans le miroir et se demandent se qu’ils voient… chaque un doit dire la vérité, chaque un doit faire-part de sa pensée, la plus profonde, la plus intime. Quel bon exercice ; une si difficile analyse de soi-même, devrait être un exemple et suivi plus souvent. À faire en couple, mais aussi en solo !


Accroupi sur une plage d’herbe d’une petite clairière à la base de la colline d’Ivanos, prés des champs de Nachmann, un tzigane russe chantait son « Dor » (amour douloureux ; amour dans l’absence de l’être aimé, manque d’amour… bref de l’amour à toutes les sauces…)

Ah devusca, focu’ti trecu prin sita timpului si strajà veni pe gîndurile mele ; ah devusca maia, mî pîcimu ? Tine’ti suferinta si pîrjolu’, doru’ de ducà si prigoana viselor ; màduva oaselor tale, amarà’i ca fierea si visul îi negru ca cerul gurii cîinelui turbat ; mîncà’mi gura fragà coaptà ; ti voi mînca suflet si liniste, vei dormi pe durere si vei visa sînge.
Cutît, cutît , sînge’n vene sà tîsneascà
Drogoste sà potoleascà !
Vîntu suflà frunza’n dungà
Dor mare mi’l alungà !


Ahhh Devoushka, le feu de ton âme traverse le tamis du temps et viens garder les flèches de mes pensées ; ah Devoushka maïa, mî pîtchimou ? Gardes ta souffrance et la braise de tes fantasmes, les envies de fuite et la chasse de tes rêves ; la moelle de tes os est amère comme la bile et tes souvenirs sont noirs comme le palais du chien enragé mange ma bouche, je mangerai ton âme et ta quiétude, tu dormiras sur la douleur, tu mangeras soupirs et tu rêveras du sang. Sur les talons de mes boots, mes doigts trouvent le rythme qu’emballe mon cœur. Sur le fond sonore de tes taffetas rouges et verts ; la roue de tes jupes tourne et fais tourner la terre entière ; sur cette roue j’aimerais être crucifié ; sur cette roue j’aimerais mourir dans les tortures les plus atroces… le rit du condamné, le bonheur avant d’être écartelé sur la place publique.
Ahhh devoushka maïaaaa !

August 1988 Bucuresti

Cartierul Armata Poporului, Strada Ràzoare, Nr 101, Bloc D, scara III, etaj 12, ap. 222, Bucuresti sector IV România cod 70777 ; ascensor în panà !
Zic un « sàrut mâna, domnisoarà » în fugà, la femeia de servici a blocului , care se afereazà în fata unui stergàtor de picioare foarte uzat ; sà faci impresie bunà nu poate sà aducà decît bine, în special cînd « joci în deplasare ».Pe usa de la intrare troneazà un afis mare anuntînd prezenta în curîn ,pe marele ecran, a filmului « Bumbesti-Livezeni » cu Iurie Darie si Viorica Tastaman, în regia lui Radu Boruzescu.(…)
Urc treptele trei cîte trei ; la etajul 11 mà hodinesc un pic , sà domolesc gîfîiala ; proaspàt odihnit mà protàpesc în fata usii ; EA mà astepta.

Silueta ei triangularà, homunculus verticalizat, cu ochii în apus de soare inversat, era în fata mea , sfidàtoare si dàtàtoare de idei ;bratele lungi, dezosate, serpi imobili , se învolburau lasciv pe umeri, apoi în jurul gîtului, fular usor de primàvarà ; cuvintele erau de prisos ; ne priveam si asta ne ajungea la amîndoi ; càldura asfaltului ce se topea în jurul blocului pàtrundea în apartament si deforma aerul viciat de fumul de tigarà . Silueta dàdu înapoi , dar nu prea mult, ca sà’mi facà loc sà trec în cadrul portii, spatiul de trecere fiind intentionat prea mic, obligîndu’mà sà’i ating pîntecu’ si mamelonul stîng care împunge tesutul de pînzà topità. Faldurile albàstrii ce’i acopereau neglijent intentiile erau imobile si simetrice . Privesc furtiv la dreapta si la stînga. Antreul, bine echipat în port mantouri si cîteva perechi de papuci. Deasupra usii o cruce si o icoanà cu Sfîntu Gheorghe omorînd balaurul ; la dreapta, bucàtària, prost luminatà de un neon pîlpîitor si de o fereastrà murdàrità de aburii de ciorbà si fripturà. Chiuveta plinà de vase care asteaptà ca, într’o bunà zi sà fie spàlate. La stînga o usà închisà pe care e lipità o fotografie reprezentînd un îngeras ca face pipi, cu un jet puternic, arciform (bag samà este vorba de wc). Drept în fatà unica piesà, destul de mare si luminoasà. Tislaifàre colorate îmbràcau mobila Solca , proaspàt achizitionatà la depozitul din Chitila. Ciucuri de màtase mov spînzurau agàtati de cheile dulapului si asteptau în van sà se zbenguie în bàtaia unui curent de aer care întîrzia sà se nascà; « recamieru’ » era acoperit cu o cergà tepoasà de lînà maramuresanà .

Cînd soneria stridentà a telefonului de bachelità neagrà , ne trezii din toropealà, zîmbetul ce cunosteam atît de bine, înflorii , si fata se schimonosii de plàcere. Vorba lentà si monotonà se amesteca fàrà echivoc cu gîndurile mele , traduse în viatà încetul cu încetul ,cu o suplete fermà ce nu làsa loc la tàgadà ;aceste cuvinte care pàtrundeau în receptor, ieseau spiralate în firul ce ducea càtre cutia neagrà si demodatà , ca mai apoi sà stràbatà orele, zilele si anii, departe , tot mai departe…càtre Germania, federalà si rîvnità !

In camerà se fàcea din ce în ce mai cald ( sau era numai o pàrere ? ) si eu profitam pe deplin de încrederea contorsiunilor si de rezistenta prefàcutà a vorbelor si faptelor. În timp ce silueta se alungea din ce în ce mai mult învingîndu’mi rezistenta , oftatul ei prelung mà aspira pe tàrîmuri nebànuite . Eu puneam stàpînire pe ce’mi apartinea ; ea dàdea ce nu mai avea de mult ; vorba’mi apàsatà, fapta cu tàrie, visul cu mîndrie , dulce vrajbà, blîndà ràzbunare …

Receptorul se odihni în furcà cu aceiasi voluptate cu care eu mà îndepàrtai de plaiul mult rîvnit si acum, tocmai acum, mult avut.
Cîteva vorbe cu iz (rolant) de lavandà rîncedà,(moisie) cuvinte lipicioase ràmase spînzurate de bachelita învechità, nu mai aveau puterea sà se desprindà si sà’si continue drumul pe calea firelor ; unul cîte unul picurarà càzînd din nou pe placa încinsà a trecutului apropiat . Sfîrîit (gresiement) prelung si semnificatif ;apoi nor alb pe cerul albastru de pînzà topità…
«Se duce la spàlat cu apà càlîie », spuse EA rîzînd, si cu o miscare dibace aruncà bucata de cer în cosul cu rufe « murdare »
« ba cu apà rece », îi întoarsei eu vorba, tràgînd usa dupà mine.
Nu i’am spus nici o datà « la revedere »
Iesind din bloc, aceiasi femeie de servici era ocupatà cu acelasi stergàtor de picioare ; « sàrut mîna » i’am spus eu în trecere , cu mult mai putinà convingere, càci stiam cà nu o voi mai revedea … nici o datà !

Novembre 2008 St.Croix

Pe peretele dinspre nord al scorburii,albit de uitare, scorojit de griji, mînjit de contradictii, unde, cu timpul apàrurà niste mici muguri ;muguri curajosi decisi sà dea viatà ramurilor vajnice …

Je regarde le mur nord de ma skorboura, blanchi par manque de lumière et écaillé par trop de soucis, taché par les contradictions successives et déformé par les inspirations d’un jour d’automne et les délires d’une nuit d’été…
Le passage inéluctable des années, laisse, dans un design parfait, les cercles cachés jusqu'à la mort des troncs des arbres ; ainsi, chaque mouvement, chaque naissance d’idée, chaque douleur d’un regard, chaque regret, chaque vague sentimentale, chaque victoire, chaque nouveau départ, mais surtout chaque arrivée, le plus petit bio courent qui traverse mon cosmos à moi, eh bien tout ça, laisse à jamais des traces dans ma skorboura.
Debout, en extase face à mon passé, modeste face à mon présent et impatient face à mon avenir, je me rends compte qu’il y a des bourgeons, des très vaillants bourgeons qui sont en train de percer l’épaisse couche de moisissure qui couvre le mur nord de ma skorboura. Ça leur fait mal, et les larmes oblongues et cristallines en témoignent !
L’écoulement au début liquide, (presque boueux à la fin) déforme tout sur son passage. Il sculpte avec maestria les alluvions entassées à droite et à gauche dans un slalom savant entre les disputes avec moi-même, lutte sans cesse contre le ridicule, victoire d’un jour contre l’éphémère invincible…
Au bout de leurs forces, avec les dernières miettes d’énergie, une fois arrivées à la base du mur, les larmes ou plutôt ce qu’il en reste, apportent ce qui formera bientôt des larges deltas qui abriteront sous un ciel de jade, sous les battements d’ailes des pélicans, des espèces rares en voie de disparition (des rêves jamais racontés, des désirs trop audacieux, des phantasmes aplatis par l’impondérable et les lourds outils qui dans un bruit de forge donneront la véracité aux amours impossibles, la foi aux non-croyants, la vue à ceux qui ont peur de regarder…)
Je reste assis, le dos vers la lumière que je laisse s’éparpiller sur ces bourgeons qui luttent pour la vie qui grandit.
… optimisme transmissible, très véhément et contagieux à tout jamais, épanouissement obligatoire…
Devant la lumière du feu, je manque d’oxygène et l’âme se sent obligée de battre des ailes ; le cœur bat plus vite, les paumes moites ont besoin de toucher la terre.
La lumière du feu est vite chassée par la lumière de l’eau.
La bataille se déroula d’après des règles strictes et peu connues (… ?) ; elle fut longue, sanglante et finira dans un vacarme d’une Vraie procréation !
Accroché d’une branche, un immense cétacé pendouillait arythmique avec indifférence et me regardait avec ses yeux de mort. Hideux dans sa putrescible immobilité, trop triste et répugnant dans l’immensité de son odeur fétide et disgracieuse comme seulement un corps sans vie peut être !
Ses yeux de mort… Ils sont si graves ; dans leur rétine j’ai pu lire des slogans politiques (lozinka) affreux. Dans les combles humides de la grande synagogue de Moscou, ils sont (mal) traduits dans toutes les langues ; ils sont aussi capables de prévoir la vision paradisiaque de la plus laide société que l’humanité a pu créer !
Sur une autre branche, tordu par l’higrassié (moisissure très humide et sale), un rêve s’accroche au passé qu’il prend pour l’avenir. Voici son histoire : 32 janvier 2513 - il est noyé dans le marc des soupirs à multe échos, mais il se débat et à la fin il arrive à faire surface … il ne faut pas confondre les sables mouvants de la vallée Orinoco avec les pétales des roses fraîchement cueillies dans la vallée de Maritza… une fois l’équilibre retrouvé il commence à fredonner « Asa începe dragostea » (« voici comme l’amour commence »)
Nourrit par ses propres arguments (Ineptzia), il grandit, retrouve l’harmonie et ne pense qu’à lui-même, à son corps de plus en plus tentaculaire… puis à son âme et à sa force de persuasion. La lutte sera rude ; le plus difficile est de se convaincre soi-même. Le reste, un jeu d’enfant ?
Des mois et des mois vont passer avant qu’il ne comprenne qu’il est né trop… tôt, beaucoup trop tôt !
Une nouvelle lutte commence ; d’adaptation à son temps, son époque, avec ces bruits et odeurs et ces silences… la solitude lui apporte le froid il essaye de se réchauffer devant le miroir avec ses propres regards pleins d’amour envers soi même ; il se prend dans ses bras et s’administre une berceuse.

Sa rêverie n’est autre qu’un exercice de style, un jeu de métaphores un mélange de souvenirs et de désirs jamais réalisés, de longs discours tenus devant la foule et des mots jamais prononcés, ni devant le miroir.
Mais aussi des gestes mille fois répétés et savourés et comparés à l’immobilité créative de l’esprit
Des bras et des torses figés, entrelacés, incarcérés dans des contorsions grotesques. Des soupirs se prélassent lascifs comme des taches sur la main qui serre fort, très fort, une cheville inesthétique… ; des paroles sans sens coulent symboliquement d’une bouche trop approchée d’un coude luxé ; les cervicales trop raide chantent un psaume de plaisir au contact d’un dos cabré. Dans cet amalgame, le rêve se retrouve,
se redresse,
lave son esprit,
secoue sa crinière,
reprend son temps,
Il est de nouveau lui-même, adapté à son ère, sa volonté est de nouveau parmi nous, prête à nous faire profiter de toutes ses qualités incontestables.

Avec sa main désossée, il prend une feuille blanche, et sûr de lui, marque en haut de la page la date et puis, en gros, le titre « PLAN B ».
Sur la troisième branche, dans un équilibre très instable, une piste de danse aussi verte qu’une table de billard et aussi grosse qu’un Stadion vide…
Une lumière bleutée et crue la balayait ; les voilà… les danseurs, les deux danseurs, ils sont là, seuls, entrelacés comme s’ils faisaient un seul, vifs, crédibles, émouvants…
Lui, habillé en Coco Chanel avec des bretelles rouges pendouillâtes jusqu’aux genoux ; le jabot, vert fenouil, en contraste avec les boutons de manchette couleur cerise-ecrasée, bordés par un filigrane plastifié, nacré. Dans le contexte, le blanc de la chemise en soie est fade, ennuyeux, presque révoltant, rappelant une tache de marmelade bulgare sur la Victoire de la Samothrace. Les chaussures, sans lacet avec des talons en verre. Sur le dos, en lettres fluo est marqué « I love the milk !»
Elle laisse sa tête tomber en arrière ; son regard, flèche partie vers qui ? Vers où ? Trace une portée virtuelle sur lequel s’accrochent les fruits de l’imagination ; de mon imagination ! (voir«fenêtre helvète» www.skorboura.com ) le tissu transparent s’accroche ou il peut, pour ne pas tomber ; les plis se suivent s’entraident, et puis s’étalent sur la plage brûlante des cuisses, en imitant sans succès les vagues d’une mer agitée …Leurs coins sursautent en découvrant des zones interdites. Les yeux audacieux sont vite punis pour leur insolence par des s

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